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Loi canadienne antipourriel : nouveaux cas de mesures d’application et enseignements tirés

Fasken
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Bulletin Protection de l'information et de la vie privée

Le 26 juin 2015, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a annoncé que Porter Airlines avait accepté de conclure un engagement relativement à des violations alléguées de la Loi canadienne antipourriel (LCAP).En vertu de cet engagement, Porter est tenu de payer 150 000 $ et d'apporter des modifications importantes à ses pratiques.

L'affaire Porter est la dernière d'une série de mesures d'application, présentées ci-après, qui soulignent l'importance pour les organisations de prendre très au sérieux les exigences de la LCAP. La violation de la LCAP peut avoir pour conséquence non seulement une amende d'un montant appréciable et l'obligation de changer ses pratiques, mais aussi de la publicité non souhaitée, notamment un communiqué de presse du CRTC et une inscription dans les sections des engagements et des procès-verbaux de violation du site Web du CRTC, sans compter la couverture de l'incident par les médias grand public. Dans le présent bulletin, nous analysons l'affaire Porter et deux autres cas de mesures d'application dignes de mention, ainsi que les enseignements à en tirer.

Porter Airlines

L'enquête du CRTC au sujet de Porter portait principalement sur les allégations suivantes : a) certains messages électroniques commerciaux (MEC) de Porter n'indiquaient ni le mécanisme d'exclusion applicable, ni les coordonnées de la personne-ressource, ce qui est contraire aux exigences de la LCAP; b) certains MEC n'indiquaient pas en termes clairs et facilement lisibles le mécanisme d'exclusion; et c) Porter n'aurait pas donné suite, dans les 10 jours ouvrables, à des demandes d'exclusion qui lui avaient été transmises. Dans son communiqué, le CRTC ajoutait que Porter n'était pas en mesure de fournir une preuve de consentement pour chacune des adresses électroniques ayant reçu ses MEC.

Dès le début de l'enquête, Porter a coopéré et a immédiatement pris des mesures visant à changer ses pratiques. Finalement, Porter a accepté de conclure un engagement pour régler cette affaire. Un engagement est une forme limitée d'exonération offerte aux organisations aux termes de l'article 21 de la LCAP. À partir du moment où un engagement a été contracté, le CRTC peut publier certains renseignements à son sujet, mais ne peut plus signifier de procès-verbal de violation et aucun tribunal ne peut entendre de demande de dommages-intérêts (une possibilité qui sera offerte à partir de 2017 avec le droit privé d'action) relativement aux questions qu'il vise.

Dans le cadre de son engagement, en plus du paiement de 150 000 $, Porter a accepté d'apporter des améliorations à son programme et à ses politiques de conformité actuels qui visent notamment la formation et l'éducation, les mécanismes de surveillance, de vérification et de rapport et les procédures disciplinaires connexes. Ces exigences sont en accord avec l'importance accordée par le CRTC à la nécessité pour les organisations d'élaborer leur propre programme de conformité à la LCAP. Le CRTC a déjà encadré l'élaboration de tels programmes dans ses Lignes directrices visant à aider les entreprises à élaborer des programmes de conformité – Bulletin d'information de Conformité et Enquêtes CRTA 2014-326.

En ce qui concerne l'affaire Porter, le CRTC déclarait ce qui suit :

« Ce cas est un rappel important qu'afin de se conformer pleinement à la loi, une entreprise doit être en mesure de fournir une preuve de consentement pour chacune des adresses électroniques des destinataires. Certaines entreprises croient à tort qu'elles respectent la loi en s'appuyant sur des pratiques et des politiques commerciales générales relativement au consentement pour la majorité des adresses électroniques auxquelles elles envoient leurs courriels commerciaux. Or, ce n'est tout simplement pas le cas. »

Si le communiqué du CRTC ne donne aucun détail sur les fondements d'une telle déclaration, il réaffirme cependant l'importance pour les organisations d'examiner attentivement les moyens qu'elles utiliseront pour s'acquitter de leur fardeau de prouver l'ensemble des consentements exprès ou tacites prévus par la LCAP. Les organisations ont tout intérêt à prendre connaissance des conseils du CRTC sur la manière dont les consentements peuvent être prouvés dans le Bulletin d'information de Conformité et Enquêtes CRTC 2012-548. Par exemple, a) un consentement oral peut être prouvé lorsqu'il peut être confirmé par une tierce partie indépendante ou au moyen d'un enregistrement sonore complet et intégral du consentement accordé (en gardant à l'esprit les exigences liées au respect de la vie privée lors de la réalisation d'enregistrements sonores); et b) les consentements obtenus par voie électronique peuvent être prouvés par les cases cochées sur une page Web lorsque « la date, l'heure et le but du consentement, ainsi que la manière dont ce dernier a été obtenu, sont enregistrés dans une base de données ».

Mesures d'application antérieures aux termes de la LCAP

Compu-Finder

Le 5 mars 2015, le CRTC a annoncé qu'il avait signifié un procès-verbal de violation assorti d'une sanction pécuniaire de 1,1 million de dollars à Compu-Finder, une société faisant la promotion de cours de formation. Il était allégué que Compu-Finder avait envoyé des MEC sans le consentement des destinataires, ainsi que des MEC pour lesquels le mécanisme d'exclusion ne fonctionnait pas correctement et des MEC contenant un mécanisme d'exclusion qui n'était pas valide pendant 60 jours, en plus d'avoir fait défaut de donner effet aux demandes d'exclusion dans un délai de 10 jours ouvrables.

Le CRTC n'a donné que peu de précisions sur les facteurs qu'il a pris en considération pour imposer la sanction de 1,1 million de dollars. Toutefois, il est utile de mentionner que 26 % de toutes les plaintes déposées dans ce secteur de l'industrie visaient Compu-Finder. De toute évidence, le CRTC était mécontent de constater que Compu-Finder avait fait défaut de suivre ses directives :

« Malgré les efforts du CRTC, Compu-Finder a violé d'une façon flagrante les principes de base de la Loi en continuant à envoyer, après l'entrée en vigueur de la Loi canadienne anti-pourriel, des messages électroniques commerciaux non sollicités aux adresses électroniques qu'elle a trouvées en parcourant les sites Web [… et] les consommateurs ont estimé que les offres de Compu-Finder n'étaient pas pertinentes pour eux. »

La déclaration ci-haut pourrait avoir été faite en référence à l'alinéa 10(9)b) de la LCAP, qui prévoit que les organisations bénéficient d'un consentement tacite à l'envoi de MEC lorsque a) la personne à qui le message est envoyé a publié bien en vue son adresse électronique; b) la publication ne comporte aucune mention précisant qu'elle ne veut recevoir aucun message électronique commercial; et c) le MEC a un lien soit avec l'exercice des attributions de la personne, soit avec son entreprise commerciale ou les fonctions qu'elle exerce au sein d'une telle entreprise. Pour de nombreuses organisations, il s'agit de l'une des exemptions les plus importantes prévues par la LCAP, en particulier dans le contexte des échanges interentreprises.

Compu-Finder avait 30 jours pour présenter des observations ou payer la pénalité. La société aurait également pu demander un engagement. Aucune nouvelle information n'a été donnée sur l'issue de cette affaire.

PlentyOfFish

Le 25 mars 2015, le CRTC a annoncé que PlentyOfFish Media Inc. avait accepté de contracter un engagement l'obligeant à payer une sanction de 48 000 $ et à apporter des changements à ses pratiques. Il était allégué que l'entreprise avait envoyé à des utilisateurs inscrits auprès de son service en ligne de rencontre des MEC indiquant un mécanisme d'exclusion qui n'était pas présenté « en termes clairs et facilement lisibles » et ne pouvait pas être facilement utilisé. Après avoir reçu des plaintes, le CRTC avait fait enquête.

Par rapport à ses commentaires antérieurs au sujet de CompuFinder, la déclaration du CRTC concernant PlentyOfFish est considérablement moins sévère, sans doute en partie parce que PlentyOfFish avait modifié ses pratiques après avoir été informée de l'enquête : « Plentyoffish Media aurait commis une erreur en envoyant, à ses utilisateurs inscrits, des messages électroniques commerciaux qui contenaient un mécanisme d'exclusion qui n'était pas conforme avec la Loi. […] Nous apprécions que l'entreprise Plentyoffish Media ait modifié ses… ».

Conclusions et enseignements à tirer

Les affaires évoquées ci-dessus réaffirment l'importance de la conformité à certaines des exigences fondamentales de la LCAP : le consentement, la preuve du consentement, les mécanismes d'exclusion et les coordonnées de la personne-ressource. La nécessité du programme de conformité est également un thème commun. Les violations de la LCAP peuvent avoir des conséquences préjudiciables importantes, notamment en ce qui concerne le temps et l'argent nécessaire pour faire face à une enquête, les sanctions pécuniaires, les mesures correctives pour se conformer à la loi et la médiatisation d'une telle affaire.

Par ailleurs, les organisations assujetties à la LCAP ont acquis une meilleure compréhension des avantages possibles de contracter un engagement avec le CRTC (dans un tel cas, le montant des sanctions est inférieur et l'annonce publique n'est faite qu'après la conclusion de l'engagement), et des types de modalités d'une telle entente pouvant être attendus et jugés acceptables par le CRTC.

Le CRTC a souligné que Porter et PlentyOfFish avaient apporté des modifications à leurs pratiques après avoir été informées de la tenue d'une enquête, ce qui laisse croire qu'il accueillera favorablement une telle attitude à l'avenir, si cela est jugé approprié.

Plus de 330 000 plaintes aux termes de la LCAP ont été reçues. À ce jour, on ne compte que trois mesures d'application de cette loi dignes de mention, mais de nombreuses enquêtes sont en cours et on peut s'attendre prochainement à de nouvelles annonces, y compris au sujet des exemptions invoquées le plus fréquemment. Celles-ci seront surveillées de près, car elles pourraient toucher un large éventail d'organisations et d'activités.

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