Le 2 décembre 2015, le projet de loi 155, la Loi modifiant la Loi sur les mines (le « Projet de loi 155 »), a été présenté en première lecture à l’Assemblée législative de l’Ontario. Le Projet de loi 155 prévoit diverses modifications d’ordre administratif à l’actuelle Loi sur les mines, L.R.O. 1990, dont la plus importante est la mise en œuvre d’un nouveau système électronique d’administration des terrains miniers en Ontario, qui comprend un système d’inscription en ligne des claims miniers. Pour les lecteurs qui désirent savoir à quoi ressemblerait une Loi sur les mines consolidée suite aux modifications proposées par le Projet de loi 155, nous avons préparé un document comparatif annoté qui peut être téléchargé (PDF, disponible en anglais seulement). Comme expressément indiqué dans le document annoté, il ne s’agit pas d’une version officielle. Ce document est informatif et a été préparé uniquement afin de permettre aux lecteurs de repérer facilement les modifications prévues par le Projet de loi 155.
Nouveau système d’inscription en ligne. Le ministère du Développement du Nord et des Mines (le « MDNM ») doit être félicité pour avoir proposé la mise en place d’un système de « jalonnement sur carte » en ligne en Ontario, similaire à ceux retrouvés dans de nombreuses autres juridictions, y compris dans certaines provinces canadiennes, et qui fera en sorte que le jalonnement au sol des claims miniers ne sera plus applicable. Toutefois, le mécanisme de transition proposé par l’Ontario est différent de ceux mis en place en Colombie‑Britannique et au Québec, où les claims existants (définis comme les « anciens claims ») pouvaient coexister avec les nouveaux claims miniers inscrits en ligne (définis comme les « claims sur cellules ») au moment de la mise en œuvre (la conversion des anciens claims en claims sur cellules s’effectuait sur une base volontaire). En vertu du Projet de loi 155, la conversion des anciens claims en claims sur cellules (ou, dans certains cas, en claims sur cellules mixtes, tel que discuté ci-après) sera obligatoire, ce qui crée des inquiétudes quant aux conséquences négatives auxquelles pourraient s’exposer les titulaires de claims qui font défaut d’agir diligemment en prévision de la conversion obligatoire à venir.
Le processus de délimitation : les bornes de claims existantes ne sont dorénavant plus pertinentes. Le Projet de loi 155 prévoit un processus de transition au terme duquel les angles et limites des claims ne seront plus définis par des bornes au sol, mais plutôt par des coordonnées UTM (mercator transverse universelle). En vertu de l’article 38.1 proposé, le registrateur de claims provincial (le « registrateur ») devra, aux fins de l’enregistrement d’un ancien claim, utiliser les renseignements déposés avec la demande d’enregistrement ainsi que les renseignements recueillis par l’intermédiaire d’inspections, de géoréférencement par système de localisation GPS (« GPS »), de travaux d’arpentage ou par tout autre moyen de vérification des limites des claims.
Le registrateur aura le pouvoir (art. 38.1(2)-(4)) de délimiter les limites d’un claim, de régler les contestations relatives aux limites qui se chevauchent et d’apporter les rajustements nécessaires. Conformément à l’article 38.1(5) proposé, à compter du jour où il est délimité par le registrateur sur la grille provinciale jusqu’à sa conversion en claim sur cellule ou claim sur cellule mixte, un ancien claim s’applique à l’égard du terrain compris dans la zone délimitée sur la grille provinciale, peu importe l’emplacement réel du claim. Finalement, bien que la majorité des décisions d’un registrateur soient susceptibles d’appel devant le Commissaire aux mines et aux terres, il n’est pas possible d’interjeter appel d’une décision relative à une délimitation d’un registrateur.
Les personnes ayant de l’expérience avec l’utilisation d’équipements GPS ont déjà souligné que le système GPS recommandé pour utilisation générale par le MDNM pourrait ne pas être suffisamment précis. Tout titulaire de claims qui désire connaître l’emplacement exact de ses anciens claims pourrait envisager d’avoir recours à un système GPS de résolution plus élevée, ou même d’effectuer des travaux d’arpentage (notamment dans des zones où des découvertes ont été réalisées).
Le processus de conversion : d’ancien claim à claim sur cellule et/ou à claim sur cellule mixte. Le processus décrit ci-après est présenté dans l’article 38.2 proposé. À une « date de conversion » future (laquelle doit être fixée par règlement), tous les anciens claims délimités seront convertis vers le nouveau système. L’article 38.2(2) proposé présente différents scénarios aux termes desquels un ancien claim sera converti en un ou plusieurs claims sur cellules et, dans certains cas, en un ou plusieurs claims sur cellules mixtes. Pour les anciens claims détenus par un seul titulaire de claims ne faisant l’objet d’aucune entente accessoire, le processus proposé semble assez simple. Toutefois, celui‑ci se complique dans les zones où sont présents plusieurs titulaires d’anciens claims ou dans les zones où l’on retrouve un seul titulaire d’anciens claims contigus dont les claims font l’objet de diverses ententes accessoires.
Titulaires d’anciens claims multiples : Aux termes de l’article 38.2(2).3 proposé, si, immédiatement avant la date de conversion, deux anciens claims délimités ou plus sont détenus par des titulaires de claim différents et font partie d’une même cellule sur la grille provinciale, la cellule devient alors une « cellule mixte » et chaque partie d’un ancien claim préexistant sera convertie en un « claim sur cellule mixte » distinct à l’intérieur de cette cellule mixte.
Titulaire unique détenant plusieurs anciens claims : Aux termes de l’article 38.2(2).4 proposé, si, immédiatement avant la date de conversion, un seul titulaire de claims détient deux anciens claims délimités ou plus, compris dans une cellule de la grille provinciale, les anciens claims, ou des parties des anciens claims délimités dans cette cellule, seront fusionnés en un seul claim sur cellule. Une telle fusion pourrait entraîner des problèmes relativement aux titres lorsque des anciens claims font l’objet d’ententes accessoires (voir les scénarios de conversion ci-après). L’article 38.2(7) proposé prévoit que lorsque des ententes, privilèges, ordonnances et autres documents sont enregistrés sur le relevé d’un ancien claim ou sont par ailleurs susceptibles d’affecter un ancien claim, les documents seront maintenus en vigueur à l’égard de tout claim sur cellule (et, le cas échéant, de tout claim sur cellule mixte) qui résulte de la délimitation et de la conversion de l’ancien claim.
Afin d’éviter une telle fusion, un titulaire de claims qui détient deux anciens claims ou plus peut, conformément aux articles 38.2(2).5 et 38.2(3) proposés, procéder à la conversion de tout ou partie de chacun des anciens claims en claims sur cellules mixtes. Une cellule qui comprend ces deux ou plus de ces anciens claims (ou parties de ces claims) deviendra une cellule mixte et chaque ancien claim (ou des parties de chaque ancien claim) compris dans une telle cellule mixte sera converti en un claim sur cellule mixte distinct (afin de mieux comprendre ce processus, veuillez vous référer au croquis présenté à l’annexe « C » dont il est question dans le scénario 2 ci-après).
Avant l’entrée en vigueur du Projet de loi 155, les titulaires de claims qui détiennent des claims miniers en Ontario devraient procéder à l’inventaire de leurs anciens claims et de toutes les ententes qui s’appliquent à ces derniers afin de s’assurer qu’une fusion telle que décrite dans le Projet de loi n’entraînera pas de conséquences imprévues. En autorisant une fusion, les titulaires de claims ontariens pourraient, par exemple, créer des problèmes de titres relatifs aux ententes accessoires tels qu’une extension de charges ou de redevances au-delà des limites initiales de l’ancien claim.
Quelques scénarios de conversion. Présumons que le titulaire de claims X détient une participation de 100 % dans les anciens claims A, B et C, et que ces anciens claims sont assujettis à des ententes accessoires distinctes et différentes auxquelles sont parties des tiers différents ayant des droits distincts. Plus précisément, l’ancien claim A est assujetti à une redevance de 3 % sur le revenu net de la fonderie (« RNF ») avec une partie, l’ancien claim B est assujetti à un RNF net de 3 % avec une autre partie et l’ancien claim C est assujetti à une option avec capacité de gain de telle sorte qu’une autre partie peut acquérir 100 % de l’ancien claim C. L’annexe « A » (PDF, disponible en anglais seulement) présente un croquis des anciens claims existants. Les scénarios ci-après présentés se concentrent sur le claim sur cellule ou la cellule mixte potentielle qui pourrait exister à l’intersection des anciens claims A, B et C.
Scénario 1 : un claim sur cellule fusionnée ABC est créé relativement à des parties des anciens claims A, B et C du titulaire de claims X (voir le croquis sous l’annexe « B » (PDF, disponible en anglais seulement)). Cette situation crée un problème évident — toutes les ententes qui s’appliquaient séparément à chacun des anciens claims A, B et C peuvent désormais s’appliquer à l’ensemble du claim sur cellule ABC (i.e. que celui-ci pourrait être assujetti à un RNF total de 6 % et que les trois différentes parties pourraient se prévaloir de l’option de capacité de gain, dépendamment des modalités des ententes accessoires (y compris la définition de « propriété » ou d’autres définitions similaires prévues dans l’option, lesquelles devraient être analysées)).
Scénario 2 : Le titulaire de claims X se prévaut de l’option disponible et établit des claims sur cellule mixte distincts A, B et C pour chaque partie des anciens claims A, B et C à l’intérieur de la cellule mixte (voir le croquis sous l’annexe « C » (PDF, disponible en anglais seulement)). Les ententes accessoires continueront de s’appliquer séparément à chacun des claims sur cellule mixte A, B et C. Cependant, il est important de noter que cela signifie que le titulaire de claims X aura le fardeau de déterminer en premier lieu si différentes ententes accessoires s’appliquent à chacun des anciens claims et, en second lieu, de faire le choix qui s’impose afin d’exiger que des claims sur cellule mixte distincts soient créés.
Le fait de fournir des opinions sur les titres et d’effectuer une vérification diligente relativement aux anciens titres convertis fusionnés pour lesquels les ententes accessoires n’ont pas été adéquatement identifiées pourrait ultimement créer de l’incertitude et donner lieu à des contestations. Il semblerait que le MDNM soit au courant que les modifications qu’il entend apporter aux titres des claims miniers pourraient entraîner des problèmes. Afin de protéger le MDNM des conséquences qui pourraient découler d’une telle incertitude et de telles contestations, l’article 38.4(1) proposé prévoit notamment qu’aucune cause d’action contre le gouvernement ne résultera directement ou indirectement : de la délimitation d’un ancien claim, de rajustements des limites effectuées par un registrateur, de la conversion d’un ancien claim en un claim sur cellule ou en un claim sur cellule mixte, de l’inscription sur le relevé des claims sur cellule des ententes et autres documents qui sont enregistrés sur le relevé de l’ancien claim.
Autres dispositions. En plus des enjeux relatifs à la délimitation et à la conversion, d’autres dispositions du Projet de loi 155 méritent d’être commentées. Dans la Loi sur les mines actuelle, on ne retrouve aucune exigence en vertu de laquelle une entente ou un document doit être inscrit sur un relevé de claim minier afin d’être opposable à un titulaire de claims[1]. L’article 58 de la Loi sur les mines contient des dispositions qui traitent des ententes conclues avant et après le jalonnement d’un claim minier. Essentiellement, une personne a le droit de faire exécuter une entente relative à un claim minier si celle-ci a été rédigée par écrit et a été signée « par la personne visée par l’exécution forcée » (essentiellement, le titulaire de claims). Quiconque a déjà procédé à une vérification diligente dans le cadre du financement d’un projet ou de la vente d’une société minière ou de claims miniers comprendra que plusieurs ententes peuvent être récupérées (particulièrement les ententes d’options et de redevances) en examinant les procès-verbaux et en effectuant des recherches dans les registres de sociétés. Il arrive fréquemment que de telles ententes ne soient pas inscrites sur les relevés de claims miniers. Or, celles-ci pourraient être exécutoires si les documents sont originaux et qu’ils ont été signés par une entité qui détient toujours les claims miniers (dans plusieurs cas, le nom n’est plus le même en raison d’un changement de nom, d’une prise de contrôle ou d’une fusion).
L’article 38.2 proposé pourrait susciter des incertitudes puisqu’il relie le caractère exécutoire à l’inscription des ententes sur le relevé des claims miniers. À l’exception de l’article 61 de la Loi sur les mines, tel que mentionné dans la note de bas de page 1, la Loi sur les mines ne prévoit aucune telle exigence. Tel que mentionné précédemment dans le présent bulletin, le Projet de loi 155 prévoit que les ententes relatives à un ancien claim qui ont été inscrites demeureront en vigueur à l’égard de leur cellule correspondante ou de leur claim sur cellule mixte correspondant et que les ententes qui demeurent en vigueur ne seront exécutoires que si elles l’étaient avant d’être continuées. Puisque l’article 38.2(7) proposé vise uniquement les ententes inscrites, quel sera le statut des ententes non inscrites qui auraient été exécutoires en vertu de la Loi sur les mines?
Le Projet de loi 155 tente de régler cette problématique en intégrant des dispositions similaires à celles de l’article 58 de la Loi sur les mines, et en vertu desquelles une entente est exécutoire si elle a été signée par le titulaire de claims inscrit et qu’elle a été rédigée par écrit. Cependant, il serait préférable que le libellé de ces dispositions précise que, malgré l’article 38.2 proposé, les ententes n’ont pas à être inscrites pour être exécutoires.
Les modifications qui seront apportées aux articles 7(4) et (4.1) pourraient aider certains titulaires d’anciens claims actuels à la suite de la conversion. En plus de la tenue de registres prévue aux termes du nouveau système d’inscription des claims miniers, le bureau du registrateur devra tenir tous les registres, cartes, documents ou renseignements relatifs aux anciens claims sous format électronique, lesquels seront accessibles au public sur le site Web du gouvernement et au bureau d’enregistrement. Toutefois, les effets juridiques de ces registres aux fins de l’exécution d’ententes à l’encontre de claims sur cellules composés d’anciens claims fusionnés demeurent toujours incertains.
Travail d’évaluation. Le Projet de loi 155 n’énonce pas clairement comment seront attribuées les exigences relatives au travail d’évaluation pour les nouveaux claims sur cellule mixte afin que la conversion vers de tels types de claims ne soit pas plus onéreuse qu’elle ne l’est aux termes des exigences actuelles relatives au travail d’évaluation (le problème potentiel étant le fait que si les exigences d’évaluation relatives à chaque claim sur cellule mixte sont les mêmes que celles d’un claim sur cellule entier, les anciennes exigences relatives à l’évaluation pourraient être doublées ou triplées). Le MDNM pourrait apporter des précisions relativement à ce processus par le biais de règlements.
En conclusion, les modifications proposées au système de titres miniers par le Projet de loi 155 permettront d’économiser temps et argent puisque l’acquisition et la recherche de titres, de même que les opérations relatives aux titres, s’effectueront sur une plateforme en ligne. Cependant, ces avantages seront quelque peu éclipsés par des problématiques transitoires, lesquelles, selon nous, ne semblent pas avoir été pleinement prises en compte et abordées dans le Projet de loi 155. Par conséquent, afin d’éviter des conséquences imprévues, les titulaires de claims pourraient avoir à se démener pour être en mesure de compléter des analyses étendues de titres avant la mise en œuvre du Projet de loi. Dans certains cas, des parties qui disposent d’ententes relatives à d’anciens claims qui ne sont pas inscrites pourraient perdre des droits relatifs à ces claims. De plus, des titulaires de claims qui, sans le savoir, fusionnent d’anciens claims adjacents en claims sur cellule pourraient être confrontés aux intérêts divergents des titulaires d’ententes. Ainsi, il est désormais le temps pour les titulaires de claims de procéder à l’analyse des emplacements et des titres de leurs claims, de même que des ententes relatives à ces titres, afin de s’assurer d’être préparés à la mise en œuvre du Projet de loi 155. Malheureusement, une telle analyse pourrait impliquer des ressources financières dont ils ne disposent pas actuellement compte tenu du contexte défavorable du marché.
[1] Sauf dans les cas de transmission d’un avis aux acheteurs subséquents. L’article 61 de la Loi sur les mines (qui est essentiellement identique dans le Projet de loi 155) prévoit que tout instrument (autre qu’un testament ayant une incidence sur le claim ou un intérêt dans un tel claim) est inopposable à un acheteur ou cessionnaire subséquent pour une contrepartie de valeur sans avis réel à moins que l’instrument soit inscrit au registre des claims miniers avant l’enregistrement de l’instrument en vertu duquel l’acheteur ou le cessionnaire subséquent effectue une réclamation. L’analyse ci-dessus s’interroge quant au fait que les instruments soient efficaces et exécutoires à l’encontre d’un titulaire de claims qui, bien qu’il soit possible qu’il ait changé plusieurs fois de nom en raison de prises de contrôle ou de fusion, demeure la même entité juridique qui détient le claim depuis le moment où il a conclu l’entente non inscrite en question.