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Rappel pour les fêtes – les cadeaux aux représentants du gouvernement au Canada sont assujettis à des règles

Fasken
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Bulletin éthique gouvernementale

Deux récentes décisions rendues par la commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique du Canada sont un rappel sobre des règles régissant les cadeaux et les marques d'accueil offerts aux fonctionnaires du gouvernement.Toute personne qui fait affaire avec le secteur public (fédéral, provincial ou municipal) doit se souvenir qu'une entorse aux règles peut causer bien des ennuis au fonctionnaire public, à la personne qui accorde l'avantage ou aux deux.

Dans une affaire, la commissaire fédérale a jugé que l'acceptation d'un bouquet de fleurs et d'une boîte de chocolats offerts par un intervenant avait enfreint la Loi sur les conflits d'intérêts.[1] Dans l'autre affaire, la commissaire a conclu que le directeur sortant de la Monnaie royale canadienne avait violé la Loi en acceptant un dîner de la part d'un fournisseur (tout en acceptant un modèle réduit de navire).[2]

Quoique ces décisions reposent sur une loi fédérale qui interdit à un titulaire d'une charge publique d'accepter un cadeau qui pourrait raisonnablement donner à penser qu'il a été donné pour influencer le titulaire dans l'exercice de ses fonctions officielles, de nombreuses lois provinciales et municipales au Canada imposent des restrictions semblables aux fonctionnaires gouvernementaux.

Par exemple, des paniers de cadeaux ont récemment été jugés constituer des cadeaux inacceptables dans la Ville d'Ottawa,[3] et, dans la Ville de Toronto, des biscuits gratuits ont été jugé enfreindre la loi municipale sur le lobbying.[4]

Acceptation de cadeaux et d'avantages

Presque chaque fonctionnaire du gouvernement fédéral, provincial et local au Canada est astreint à des règles qui limitent l'acceptation de cadeaux, de divertissements et d'autres avantages.

Hormis le Code criminel, qui traite d'activités de corruption assorties d'avantages en faveur de fonctionnaires publics partout au Canada,[5] il n'existe aucune « règle universelle sur les cadeaux » qui s'applique à tous les territoires. Plutôt, l'acceptation de cadeaux et d'avantages est assujettie aux lois du gouvernement (fédéral, provincial ou municipal) dans lequel le bénéficiaire occupe sa charge. Souvent, l'acceptation est régie par une règle ou une politique déterminée du ministère, de l'organisme ou de l'institution donné dont le bénéficiaire est fonctionnaire.

Même au sein d'un seul territoire, des règles différentes s'appliquent à différentes catégories de fonctionnaires. Par exemple, les ministres du cabinet fédéral, les hauts fonctionnaires et les adjoints ministériels sont visés par les règles sur les cadeaux énoncées dans la Loi sur les conflits d'intérêts, tandis que d'autres employés du gouvernement sont régis par le Code régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat et les membres du Parlement sont tenus d'observer le Code régissant les conflits d'intérêts des députés.

Des différences semblables existent dans la plupart des provinces, notamment en Alberta,[6] en Colombie-Britannique,[7] en Ontario[8] et au Québec.[9]

La Colombie-Britannique a adopté une loi qui réglemente l'acceptation de cadeaux par tous les conseillers municipaux dans la province.[10] Dans le même ordre d'idées, la loi du Québec exige que chaque municipalité adopte un code d'éthique et de déontologie qui comprend une règle interdisant à tout membre d'un conseil d'accepter tout don, toute marque d'hospitalité ou tout autre avantage, qui peut influencer son indépendance de jugement dans l'exercice de ses fonctions ou qui risque de compromettre son intégrité.[11]

En revanche, les municipalités de l'Ontario et de l'Alberta sont actuellement libres de choisir de se doter de leurs propres règles, s'il en est, concernant les cadeaux offerts aux membres de conseils.[12]

Qu'elles soient tenues de le faire ou qu'elles aient agi volontairement, de nombreuses municipalités canadiennes ont adopté des politiques et règles régissant l'acceptation de cadeaux et dons par des membres du conseil. Certaines ont également adopté des politiques et règles concernant les cadeaux et dons aux employés du gouvernement municipal.

Sauf stipulation contraire, les règles fédérales, provinciales et municipales portant sur l'acceptation d'avantages par des fonctionnaires publics ne s'appliquent pas à la personne qui offre ou donne l'avantage. Les exceptions notables sont analysées à la rubrique suivante.

Même lorsqu'elles ne sont pas directement touchées par une restriction applicable aux cadeaux, les sociétés et les organismes, pour la plupart, comprennent, toutefois, qu'il est contreproductif d'accorder à un fonctionnaire du gouvernement un avantage qui pourrait attirer des ennuis au destinataire.

Octroi d'avantages aux fonctionnaires du gouvernement

Dans de nombreux territoires, il est interdit aux sociétés, aux organisations et aux particuliers qui se livrent à des activités de lobbyisme auprès du gouvernement d'offrir des cadeaux, des dons ou des avantages à des titulaires d'une charge publique.

Par exemple :

  • En vertu du Code de déontologie des lobbyistes fédéral, un lobbyiste ne doit pas offrir ou promettre un cadeau, une faveur ou un autre avantage à un titulaire d'une charge publique, auprès duquel il fait ou fera du lobbying[13], que le titulaire d'une charge publique n'est pas autorisé à accepter.
  • Constitue une infraction en vertu de la Loi de 1998 sur l'enregistrement des lobbyistes de l'Ontario le fait pour un lobbyiste de placer sciemment le titulaire d'une charge publique dans une situation de conflits d'intérêts, y compris en faisant accepter par le titulaire de la charge des honoraires, des dons ou des avantages personnels qui sont liés, directement ou indirectement, à l'exercice des devoirs de sa charge, sauf si l'une de quatre exceptions limitées s'applique.[14] L'amende maximale pour une première infraction est de 25 000 $.[15]
  • Au Québec, le Code de déontologie des lobbyistes interdit à un lobbyiste d'inciter un titulaire d'une charge publique à contrevenir aux normes de conduite qui lui sont applicables. Par exemple, ceci interdirait à un lobbyiste d'inciter un titulaire d'une charge publique à contrevenir à une restriction applicable à l'acceptation de cadeaux, de dons et d'avantages.[16] Un lobbyiste qui contrevient à cette interdiction est passible d'une amende éventuelle à hauteur de 25 000 $.[17]
  • La Ville de Toronto a fixé une sanction maximale de 25 000 $ en cas de contravention de la règle qui stipule ce qui suit : « [TRADUCTION] Les lobbyistes ne doivent pas entreprendre des activités de lobbying qui revêtent une forme ou qui sont exercées d'une manière qui comprend le fait d'offrir, de fournir ou d'octroyer des divertissements, des cadeaux, des dons, des repas, des voyages ou des faveurs de quelque nature que ce soit ».[18]
  • Dans la Ville d'Ottawa, l'interdiction est encore plus large : « Les lobbyistes dont l'inscription des dossiers de lobbying est active, leurs clients inscrits au registre ou leurs employés ne doivent pas offrir ou remettre, directement ou indirectement, un cadeau, un avantage ou une invitation à des membres du Conseil ou à leur personnel ».[19]

L'acceptabilité et la déclaration ne sont pas la même chose

De nombreux territoires exigent une déclaration publique chaque fois qu'un fonctionnaire du gouvernement reçoit un cadeau ou un don dont la valeur dépasse un certain seuil. Par exemple, en vertu de la Loi sur les conflits d'intérêts fédérale, le titulaire de la charge publique faisant la déclaration doit faire état de cadeaux ou d'autres avantages d'une même source sur une période de 12 mois si la valeur totale excède 200 $.[20] Le même seuil de déclaration de cadeaux et dons de 200 $ s'applique aux membres de l'Assemblée nationale[21] et aux membres du personnel d'un cabinet ministériel[22] dans la province du Québec ainsi qu'aux députés de l'assemblée législative de l'Ontario.[23] Pour ce qui est des députés de l'assemblée législative[24] et des conseillers municipaux[25] de la Colombie-Britannique, le seuil de déclaration des cadeaux et dons s'élève à 250 $.

Souvent, les bénéficiaires et les auteurs des cadeaux et dons confondent le seuil de déclaration avec la confirmation qu'un cadeau ou un avantage est convenable et acceptable. En d'autres mots, bien d'entre eux prennent pour acquis qu'un cadeau d'une valeur d'au plus 200 $ (ou 250 $) peut toujours être accepté. Ceci est faux. Le seuil exigeant la déclaration d'un cadeau ou d'un don n'a aucun rapport avec la question de savoir si le cadeau ou le don peut être accepté à bon droit.

Prochaines étapes

Les sociétés et les organisations qui traitent avec le gouvernement devraient adopter une politique visant les cadeaux et les marques d'accueil offerts aux titulaires d'une charge publique. Cette politique devrait inclure un processus clair d'approbation interne.

Les employés qui ont des rapports fréquents avec des fonctionnaires du gouvernement devraient recevoir une formation régulière sur les façons d'éviter de placer ces fonctionnaires dans des situations de conflits d'intérêts.

Il y a lieu de vérifier les règles et les politiques régissant les cadeaux et les dons dans le territoire pertinent avant d'offrir quoi que ce soit à un titulaire d'une charge publique.

Consultez un expert

Toute personne a le droit à l'assistance d'un avocat pendant la tenue d'une enquête sur l'octroi ou la réception prétendus d'un avantage irrégulier. Vous avez le droit de consulter un avocat doté d'une expertise en droit de l'éthique gouvernementale avant de répondre à des demandes de renseignements.


[1]     Le rapport Vennard. Les fleurs et les chocolats avaient coûté 123,80 $. Le rapport n'indique pas clairement si ce montant comprenait la livraison et/ou les taxes.

[2]     Le rapport Bennett. Le coût du dîner état d'environ 100 $ par personne et celui du modèle réduit du navire de 150 $.

[3]     Accord d'observation, Dossier no 04-16.

[4]     Rapport intitulé « Report to Council on the Provision of Gifts by a Consultant Lobbyist Firm (2014) ».

[5]     L.R.C., 1985, c. C-46, partie IV, art. 118, 119, 121, 122, 123.

[6]     Les cadeaux offerts à des fonctionnaires publics sont assujettis au code intitulé Code of Conduct and Ethics for the Public Service of Alberta, Part IV; l'acceptation de cadeaux par des attachés politiques est visée par le code intitulé Code of Conduct for Employees Serving in the Offices of the Premier and Cabinet Ministers, soit l'annexe appelée Schedule 2 du décret Premier's and Ministers' Staff Employment Order, O.C. 502/2014. Les cadeaux offerts aux ministres et membres de l'assemblée législative sont régis par la loi intitulée Conflicts of Interest Act, R.S.A. 2000, c. C-23.

[7]     Pour ce qui est des cadeaux offerts à des fonctionnaires publics, se reporter à BC Public Service Agency, Standards of Conduct. L'acceptation de cadeaux par les membres du personnel politique est régie par le règlement intitulé Standards of Conduct for Political Staff Regulation, B.C. Reg. 67/2014. Les cadeaux offerts aux membres de l'assemblée législative sont régis par la loi intitulée Members' Conflict of Interest Act, R.S.B.C. 1996, c. 287.

[8]  Des règlements distincts pris en vertu de la Loi de 2006 sur la fonction publique de l'Ontario s'appliquent aux adjoints ministériels (Règles relatives aux conflits d'intérêts visant les fonctionnaires actuels et anciens des cabinets des ministres, Règl. de l'Ont. 382/07) et aux autres employés du gouvernement (Règles relatives aux conflits d'intérêts visant les fonctionnaires actuels et anciens des ministères, Règl. de l'Ont. 381/07). L'acceptation de cadeaux par les membres de l'assemblée législative est assujettie à la Loi de 1994 sur l'intégrité des députés, L.O. 1994, c. 38.

[9]     L'article 6 du Règlement sur l'éthique et la discipline dans la fonction publique, R.L.R.Q., c. F-3.1.1, r. 3, interdit aux fonctionnaires publics d'accepter des cadeaux. L'acceptation de cadeaux et d'avantages par les membres de l'Assemblée nationale est régie par la partie IV, Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale, R.L.R.Q., c. C-23.1. L'acceptation de cadeaux par le personnel politique est assujettie au Règlement concernant les règles déontologiques applicables aux membres du personnel d'un cabinet ministériel, R.L.R.Q., c. C-23.1, r. 2, et les cadeaux offerts à d'autres titulaires d'une charge publique sont visés par le Règlement sur l'éthique et la déontologie des administrateurs publics, R.L.R.Q., c. M-30, r. 1.

[10]    Loi intitulée Community Charter, S.B.C. 2003, c. 26.

[11]    Loi sur l'éthique et la déontologie en matière municipale, R.L.R.Q., c. E-15.1.0.1.

[12]    À une date qui sera fixée par le cabinet de l'Alberta, la loi intitulée Municipal Government Act sera modifiée par l'ajout d'un nouvel article 146.1 qui exigera que les municipalités adoptent des codes de déontologie et qui permettra au ministre par règlement de rendre obligatoires certains éléments (peut-être des restrictions concernant les cadeaux) : loi intitulée Municipal Government Amendment Act, S.A. 2015, c. 8. Un projet de loi présentement à l'examen par l'assemblée législative de l'Ontario renferme une proposition semblable : Projet de loi 68, Loi de 2016 sur la modernisation de la législation municipale ontarienne.

[13]    C'est-à-dire, un titulaire de charge publique fédérale qui est ou sera visé par les activités de lobbying du lobbyiste.

[14]    La Loi de 1998 sur l'enregistrement des lobbyistes intègre les règles contenues dans la Loi de 1994 sur l'intégrité des députés (et s'applique à l'ensemble des titulaires d'une charge publique). En vertu de cette dernière loi, les quatre exceptions à l'interdiction de faire des cadeaux ou des dons sont les suivantes : a) une indemnisation qu'autorise la loi; b) un don ou un avantage personnel qui est reçu dans le cadre du protocole, en raison de la coutume ou à l'occasion d'obligations officielles, qui accompagnent habituellement les devoirs de la charge; c) des honoraires, un don ou un avantage personnel qui sont remis, directement ou indirectement, par un parti politique, une association de circonscription, un candidat ou un candidat à la direction d'un parti inscrits aux termes de la Loi sur le financement des élections ou en leur nom, y compris une rémunération ou une aide financière; et d) tout autre don ou avantage personnel, si le commissaire à l'intégrité est d'avis qu'il est improbable que sa réception donne lieu à une présomption raisonnable voulant que le don ou l'avantage ait été remis afin d'influencer le député dans l'exécution de ses fonctions.

[15]    Loi de 1998 sur l'enregistrement des lobbyistes, L.O. 1998, c. 27, annexe, par. 18(8).

[16]    Se reporter à la note 9.

[17]    Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme, R.L.R.Q., c. T-11.011, art. 63.

[18]    Code intitulé Toronto Municipal Code, Chapter 140, §§ 140-42A, 140-47.

[19]    Code de conduite des lobbyistes, par. 6(3).

[20]    Loi sur les conflits d'intérêts, art. 23.

[21]    Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale, art. 31.

[22]    Règlement concernant les règles déontologiques applicables aux membres du personnel d'un cabinet ministériel, art. 13.

[23]    Loi de 1994 sur l'intégrité des députés, art. 6.

[24]    Loi intitulée Members' Conflict of Interest Act, art. 7.

[25]    Loi intitulée Community Charter, art. 106.

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Auteur

  • Guy W. Giorno, Associé | Lutte à la corruption et aux pots-de-vin, Toronto, ON | Ottawa, ON, +1 613 696 6871, ggiorno@fasken.com