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Qu’arrive-t-il lorsqu’un employé est accusé d’un crime commis à l’extérieur du lieu de travail? | L'Espace RH

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Bulletin Travail, emploi et droits de la personne

Un employeur peut prendre des mesures disciplinaires contre un employé, et même le congédier, en raison d'une inconduite commise en dehors des heures de travail. Cependant, une récente décision d'un tribunal de l'Ontario semble avoir limité les situations dans lesquelles il serai permis pour un employeur d'agir. Dans l'affaire Merritt c. Tigercat Industries (PDF - disponible en anglais seulement),  la cour a conclu qu'un employé avait été injustement congédié suite à des accusations criminelles d'agression sexuelle qui avaient été déposées contre lui. L'employé a obtenu des dommages-intérêts à titre d'indemnité de préavis.

Le contexte

M. Merrit était un ouvrier de 67 ans qui travaillait pour Tigercat Industries. Cette société produit des machines industrielles et forestières. M. Merrit travaillait pour la société depuis 1998 et a été congédié en février 2015. La société affirmait avoir un motif valable de le congédier.

M. Merrit a été arrêté dans une installation de Tigercat. Il a été accusé sous deux chefs d'agression sexuelle contre des mineurs. La direction a rencontré M. Merrit le lendemain, mais ce dernier a refusé de fournir des détails sur les accusations. Il s'est contenté de dire que les évènements allégués n'étaient pas survenus en milieu de travail et n'impliquaient aucun des employés de Tigercat. On a demandé à M. Merrit de démissionner, mais il a refusé. Il a toutefois accepté de prendre un congé de deux semaines.

Suite à son congé et au moment de son retour au travail, M. Merrit a été congédié. Aucun rapport d'enquête n'a été produit. Aucun avis écrit et aucun motif de congédiement ne lui a été remis.

M. Merrit a poursuivi Tigercat pour congédiement injustifié. La société a soutenu que M. Merrit avait fait l'objet d'un congédiement pour cause juste, fondé sur les accusations criminelles et sur l'atteinte à la réputation de Tigercat par ces accusations.

La décision

Le juge de première instance a critiqué Tigercat pour ne pas avoir mené d'enquête avant de décider de congédier M. Merritt. Les accusations criminelles n'étaient pas associées à son emploi et n'impliquaient pas d'autres employées. Il n'existait aucune preuve d'atteinte à la réputation de Tigercat. Le tribunal a conclu que Tigercat n'avait pas établi que le congédiement était fait pour une cause juste et suffisante. La Cour a accordé à M. Merritt l'équivalent de dix mois de salaire à titre de dommages pour congédiement sans cause.

Il ressort de la décision que la conduite inappropriée d'un employé en dehors des heures de travail peut servir de motif de congédiement motivé, mais seulement dans des circonstances très limitées. À cet effet, l'employeur a le fardeau d'établir l'existence de l'un ou plusieurs des éléments suivants :

  • l'inconduite porte atteinte à la réputation ou aux produits de la société;
  • elle rend l'employé incapable d'effectuer ses tâches de façon satisfaisante;
  • elle amène d'autres employés à refuser de travailler avec l'employé visé, ou à être réticents ou incapables de le faire;
  • elle constitue une violation importante du Code criminel, ce qui nuit à la réputation générale de la société et de ses employés; ou
  • elle entraîne, pour l'employeur, des difficultés à gérer la main-d'œuvre d'une manière efficiente et efficace.

Il n'est pas nécessaire que tous ces facteurs soient présents. L'un ou l'autre des facteurs, selon son incidence peu, à lui seul, justifier un congédiement pour cause. L'existence d'un lien entre l'inconduite et l'employeur ou la nature de l'emploi revêt cependant une importance primordiale.

La Cour a clairement affirmé que des accusations criminelles en soi ne constituent pas un motif valable de congédiement lorsque les faits se sont produits en dehors des heures de travail.

Ce que les employeurs doivent retenir

L'inconduite en dehors des heures de travail, même l'inconduite la plus répréhensible, ne constituera généralement pas en soi une cause juste de congédiement. Un lien doit exister entre le comportement et le travail; ou, l'employé doit être un employé « de première ligne » ou exercer une fonction publique, ce qui pourrait causer une atteinte à la réputation de l'employeur.

Les employeurs doivent agir prudemment dans de tels cas. La tenue d'une enquête faite en bonne et due forme est essentielle. Ce processus doit comprendre l'obtention de déclarations pertinentes, la conservation des dossiers complets, le respect de toutes les politiques en milieu de travail et la possibilité pour l'employé de répondre aux allégations d'inconduite.

Cela ne signifie pas que les employeurs ne peuvent pas congédier ou discipliner des employés pour une inconduite en dehors des heures de travail. Les employeurs doivent toutefois être sensibles aux risques en la matière et prendre les mesures appropriées pour empêcher d'engager leurs responsabilités.



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