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Quand une image vaut… plusieurs milliers de dollars : un tribunal ontarien rend une décision clé en matière de droit d’auteur en ligne

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Bulletin Propriété Intellectuelle - Technologie de l'information

La décision récente de la Cour supérieure de justice de l’Ontario dans l’affaire Trader Corp v CarGurus Inc. (anglais seulement) crée un précédent majeur à plusieurs égards dans le domaine du droit d’auteur canadien[1]. C’est la première décision canadienne à se pencher à la fois sur les dispositions d’exonération relatives aux « outils de repérage » applicables aux moteurs de recherche, et sur le droit de « mise à disposition » – et ce n’est qu’un début.

Ce bulletin résume brièvement les faits, puis décrit chacune des principales questions soulevées et tranchées dans l’affaire CarGurus.

Les faits

Cette affaire opposait les propriétaires de deux marchés en ligne de véhicules neufs et d’occasion très populaires. Trader Corporation exploite les sites Web bien connus « autotrader.ca » et « autohebdo.net ». La plupart des gens savent que ces sites Web contiennent des photographies de véhicules offerts à la vente par différents concessionnaires canadiens. Mais bon nombre de gens ignorent que Trader propose également un service de photographie aux concessionnaires automobiles et qu’environ 5 % de tous les clichés figurant dans les annonces de véhicules canadiens sont en réalité pris par des employés de Trader, et non pas par le concessionnaire sur le site Web duquel ils apparaissent.

En 2015, CarGurus a lancé ses activités au Canada et, dans le cadre de ses opérations Web, a commencé à indexer les sites des concessionnaires dans le but de constituer ses propres listes d’annonces. Cette opération d’indexation massive incluait la copie des photographies de véhicules publiées sur les sites Web des concessionnaires, y compris celles qui avaient été prises par des employés de Trader. CarGurus avait utilisé avec succès cette stratégie d’indexation massive aux États-Unis, où l’opérateur n’avait reçu que peu de plaintes de la part des concessionnaires, car l’opération avait fait profiter ces derniers de pistes de vente.

Peu de temps après le début des activités canadiennes de CarGurus, Trader a commencé à se poser des questions au sujet de la source des photos des véhicules de CarGurus et a communiqué avec cette dernière société pour lui demander si elle indexait les sites de Trader pour d’obtenir ces photos. CarGurus, tout en niant avoir indexé les sites de Trader, a refusé de répondre aux questions concernant l’indexation possible des sites des concessionnaires. Pour sa part, Trader n’a jamais révélé que bon nombre des photos apparaissant sur les sites Web des concessionnaires avaient été prises par ses employés. Ainsi, les deux opérateurs ont chacun dissimulé à l’autre des renseignements d’une importance capitale, ce qui aura par la suite certaines conséquences juridiques.

Lorsque CarGurus a finalement révélé détenir des droits d’auteur sur certaines photographies de concessionnaires, des pourparlers sur une éventuelle licence ont été entamés, mais ont vite abouti à une impasse et Trader a intenté une action en violation du droit d’auteur. CarGurus a réagi en supprimant rapidement autant de photos litigieuses que possible, mais cela n’a pas satisfait Trader, qui a accusé CarGurus d’avoir violé son droit d’auteur sur près de 200 000 photos et a réclamé des dommages-intérêts préétablis de 98 millions de dollars. CarGurus a nié la violation, invoquant à la fois l’utilisation équitable et les dispositions d’exonération relatives à l’« outil de repérage » adoptées lors de la réforme de 2012 de la Loi sur le droit d’auteur.

1. Qui peut se prévaloir des dispositions d’exonération relatives à l’« outil de repérage »?

CarGurus est la première décision canadienne dans laquelle est appliqué l’article 41.27 de la Loi sur le droit d’auteur qui prévient, dans la plupart des situations, l’octroi de dommages-intérêts au titre de la violation du droit d’auteur relativement à un « outil de repérage ». Aux termes de la Loi, « outil de repérage » s’entend de « tout outil permettant de repérer l’information qui est accessible sur l’Internet ou tout autre réseau numérique[2] ».

Pour tenter de démontrer que son service répondait à la définition de l’outil de repérage, CarGurus a allégué la similarité de ses services avec ceux des moteurs de recherche en ligne traditionnels, qui indexent eux aussi les sites Web des concessionnaires automobiles. La Cour a rejeté cet argument du revers de la main en soulignant que CarGurus ne faisait qu’orienter les utilisateurs vers des copies de documents provenant des sites Web des concessionnaires et stockés dans la base de données exclusive de CarGurus, au lieu d’aider les internautes à trouver ces documents sur les sites Web des concessionnaires :

[Traduction] « L’élément central de l’expression « outil de repérage » définie dans la Loi est le repérage de l’information – il s’agit d’un outil « permettant de repérer l’information qui est accessible sur l’Internet ». À mon avis, le législateur entendait offrir une protection aux intermédiaires qui proposent des outils permettant aux utilisateurs de naviguer et de repérer l’information disponible sur Internet. Il n’avait pas l’intention d’accorder cette protection à des fournisseurs comme CarGurus qui recueillent l’information disponible sur Internet et la mettent à la disposition de l’utilisateur sur leur propre site Web[3]. »

Dans un sens, la Cour a conclu que CarGurus représentait à la fois moins et plus qu’un moteur de recherche. Le site de CarGurus représentait moins qu’un moteur de recherche parce qu’il ne permettait pas aux utilisateurs d’atteindre directement la source, mais faisait plutôt office de courtier ou d’intermédiaire pour les consommateurs à la recherche d’un véhicule d’occasion. Les utilisateurs souhaitant consulter l’annonce du concessionnaire devaient communiquer avec CarGurus au lieu de pouvoir cliquer eux-mêmes sur un lien les amenant au document original. C’était aussi plus qu’un moteur de recherche, puisque CarGurus avait constitué une base de données exclusive du contenu des sites Web des concessionnaires à des fins autres que la mise en mémoire cache.

Même si l’ensemble des répercussions de cette décision reste à établir, il semble à première vue qu’un outil permettant d’effectuer une recherche dans une base de données exclusive compilée par le créateur même de cet outil ne relève pas du champ d’application de la disposition d’exonération 41.27 s’il n’offre pas aux utilisateurs un accès direct à l’information recherchée, à son emplacement d’origine. 

2. Le droit de « mise à disposition » au Canada

Le droit de « mise à disposition » figure depuis 2012 dans la Loi sur le droit d’auteur, où il est défini comme faisant partie du droit de communiquer une œuvre au public par télécommunication : « Pour l’application de la présente loi, constitue notamment une communication au public par télécommunication le fait de mettre à la disposition du public par télécommunication une œuvre ou un autre objet du droit d’auteur de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement[4]. ». Ce nouveau droit découle de l’adhésion du Canada au Traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur le droit d’auteur, adopté en 1996, où il est précisé que le droit exclusif de communiquer une œuvre au public inclut la mise à la disposition du public de celle-ci, car on craignait que certaines formes de communications au public par des réseaux informatiques, par exemple Internet, ne soient autrement pas traitées de la manière appropriée par la législation sur le droit d’auteur.

Au cours des cinq années écoulées depuis l’entrée de ce droit dans la législation, aucune instance judiciaire, ou même administrative, ne s’est prononcée de façon définitive au sujet de la nature des activités assimilables à une mise à disposition d’une œuvre. La décision CarGurus constitue donc une première en ce qui concerne la prise en compte de cette notion.

Dans cette affaire, la Cour a conclu que la publication d’une image sur un site Web constitue une « mise à disposition » de cette image[5]. Cette conclusion pourrait laisser entendre que la plupart des utilisations sur Internet des œuvres protégées par droit d’auteur pourraient être présentées comme relevant d’une « mise à disposition » de celles-ci au sens juridique de cette expression et, partant, donneraient ouverture au droit de télécommunication. Aucune des deux parties n’a invoqué l’arrêt de la Cour suprême concernant la portée du droit de « communiquer par télécommunication » dans l’affaire ESA c. SOCAN, où la Cour a statué que le droit de communiquer une œuvre au public par télécommunication ne pouvait s’appliquer dans le cas où est effectué le téléchargement d’une copie « permanente » de l’œuvre[6]. Il reste à déterminer si cet arrêt est applicable à la « mise à disposition » des œuvres et, le cas échéant, dans quelle mesure il s’applique.

3. Responsabilité relative au « cadrage » d’images sur un site Web

CarGurus a fait valoir que pour au moins quelques-unes des photos, il ne devait pas être tenu responsable d’une violation du droit d’auteur car ces photographies n’avaient jamais été hébergées sur ses propres serveurs, mais avaient plutôt été « cadrées » (framed); autrement dit, le site de CarGurus se contentait d’afficher des images hébergées sur les propres serveurs des concessionnaires. Dans un tel cas, c’est le serveur du concessionnaire qui communiquait l’œuvre directement à l’ordinateur de l’internaute. Cet argument a été écarté par la Cour, qui a souligné que les photographies, sans égard au lieu physique où elles étaient conservées sous forme de fichier numérique, étaient « mises à la disposition » du public par CarGurus, puisqu’elles s’affichaient sur l’écran de l’utilisateur à côté de contenus provenant du serveur de cet opérateur[7].

Cette décision, la première au Canada où le cadrage est analysé sous l’angle de la violation du droit d’auteur, a des répercussions importantes pour toute entreprise qui affiche du contenu en ligne par le procédé de cadrage[8]. Bon nombre d’utilisateurs d’œuvres protégées auraient de bonnes raisons de croire que le cadrage ou l’utilisation de liens incorporés vers un contenu hébergé sur un autre site Internet ne devrait pas engager leur responsabilité, en particulier si le contenu cadré a été publié en ligne de manière licite par le titulaire du droit d’auteur. Après tout, telle est la position qui prévaut dans l’Union européenne[9].

Après la décision CarGurus, la position canadienne apparaît sans doute plus contraignante. Dans cette affaire, la Cour semble adopter le point de vue des utilisateurs d’Internet, notamment en statuant que l’intégration de contenu dans un site Web par cadrage constitue une deuxième « mise à disposition » distincte de ce contenu. Par conséquent, le propriétaire du site Web qui effectue ce cadrage doit obtenir le consentement du titulaire du droit d’auteur avant de se livrer à de telles activités, même si l’incorporation du lien ou le cadrage renvoie à des copies autorisées de l’œuvre protégée. Quant à savoir si un tel raisonnement pourrait aussi s’appliquer à un simple hyperlien, seule une décision ultérieure permettra de trancher cette question.

4. Rejet de la défense d’utilisation équitable dans un contexte commercial

CarGurus a invoqué la défense d’utilisation équitable, en faisant valoir qu’elle ne faisait que faciliter la recherche des acheteurs de véhicules, et que son utilisation des photographies de trader devait donc être protégée par ce droit. Pour se prévaloir de cette défense, CarGurus devait satisfaire à un critère en deux étapes, c’est-à-dire établir en premier lieu qu’elle utilisait les photographies sous droit d’auteur à une fin protégée et, deuxièmement, que cette utilisation était équitable.

CarGurus a réussi facilement à franchir la première étape, le juge de première instance ayant statué que les photographies facilitaient la recherche d’un véhicule à vendre et qu’une telle activité constituait une forme de « recherche » aux fins de la Loi sur le droit d’auteur[10]. Cette conclusion est une application de l’arrêt fondateur Bell c. SOCAN, où la Cour suprême a statué que lorsque des services de musique en ligne offrent au consommateur l’écoute préalable d’extraits avant qu’il ne décide d’acheter l’œuvre ou non, il s’agit d’une forme de « recherche »[11].

Par contre, CarGurus n’a pas pu passer la deuxième étape, car la Cour a conclu que son utilisation n’était pas équitable pour plusieurs raisons : CarGurus affichait la photographie intégrale (et non pas une vignette ou miniature de celle-ci), les photographies demeuraient en ligne pendant une période indéterminée, elles étaient utilisées pour servir ses intérêts commerciaux (à savoir concurrencer directement le titulaire du droit d’auteur), et CarGurus aurait pu opter pour plusieurs solutions de rechange qui ne violaient pas le droit d’auteur,  notamment embaucher ses propres photographes[12].

Ainsi, à la deuxième étape du critère d’utilisation équitable, l’affaire CarGurus offre un contrepoint intéressant à l’arrêt Bell c. SOCAN, les deux décisions illustrant clairement ce qui constitue, ou ne constitue pas, une utilisation équitable d’œuvre protégées dans un contexte commercial.

5. La violation du droit d’auteur sur des œuvres incorporées dans un « même support matériel » donne lieu à des dommages-intérêts préétablis de 2 $ par photographie

Normalement, le montant des dommages-intérêts préétablis applicables aux violations du droit d’auteur commises à des fins commerciales varie de 500 $ à 20 000 $ par œuvre. Trader ayant établi qu’environ 150 000 œuvres faisaient l’objet d’une violation du droit d’auteur, cet opérateur aurait été en droit de recevoir au moins 75 millions de dollars au titre des dommages-intérêts préétablis.

Toutefois, la Loi sur le droit d’auteur autorise le tribunal à réduire le montant minimal de 500 $ accordé par œuvre si deux conditions sont remplies : (i) si le montant de 500 $ était accordé, le montant total serait extrêmement disproportionné à la violation; et (ii) « plus d’une œuvre ou d’un autre objet du droit d’auteur sont incorporés dans un même support matériel ». En l’espèce, la question principale était de déterminer si les violations avaient été commises sur le même support matériel, Trader faisant valoir que les violations avaient porté sur de multiples plateformes Web et mobiles qui ne pouvaient être considérées comme un « même support matériel ».

La Cour n’a pas retenu cet argument et a statué que le terme « support matériel » devait recevoir une interprétation large, en citant deux décisions antérieures dans lesquelles l’utilisation d’œuvres protégées par droit d’auteur sur un site Web avait été assimilée à une utilisation sur un même support matériel[13]. La Cour a ajouté que même si les annonces de CarGurus pouvaient être consultées à partir soit d’un navigateur Web, soit de l’application mobile CarGurus, la base de données contenant ces annonces n’en constituait pas moins un « même support matériel[14] ». L’application mobile et le site Web n’étaient que deux moyens différents d’accéder à ce même support matériel[15]. La Cour a donc logiquement conclu qu’un montant de 75 millions de dollars serait extrêmement disproportionné et a ramené les dommages-intérêts à 2 $ par photographie, pour un total d’environ 300 000 $[16].

Cette conclusion confirme la tendance des tribunaux canadiens à donner une interprétation large à l’expression « même support matériel », ce qui leur permet ensuite de réduire le montant des dommages-intérêts préétablis qu’ils jugent extrêmement disproportionné. Il serait intéressant de voir si les conclusions auraient été différentes si CarGurus avait hébergé sur des serveurs distincts son application mobile et son site Web – la Cour aurait-elle alors considéré qu’il s’agissait de deux supports matériels différents, ou aurait-elle fait abstraction de cette différence matérielle et considéré que toutes les reproductions numériques utilisaient le même support matériel puisqu’elles étaient dans les deux cas disponibles par Internet? Pour le moment, il semble que l’exigence d’un même support matériel soit, dans le cas d’une société informatique, liée à la configuration informatique d’arrière-plan, et non pas au nombre d’interfaces avec les consommateurs qui permettent l’accès à cet arrière-plan.

6. L’obtention d’un avis juridique et la suppression rapide des photographies litigieuses ont permis d’éviter l’imposition de dommages-intérêts punitifs

La Cour a statué que, CarGurus n’ayant pas commis de violation de mauvaise foi, il n’y avait aucune raison d’accorder des dommages-intérêts punitifs[17]. Cette conclusion se fonde sur trois mesures prises par CarGurus et sur une mesure prise par pour Trader.

Tout d’abord, avant son entrée sur le marché canadien, CarGurus avait obtenu l’avis juridique d’un avocat canadien qui avait validé sa stratégie d’indexation[18]. Deuxièmement, CarGurus n’avait fait qu’appliquer le modèle d’affaires qu’il avait utilisé avec succès aux États-Unis sans connaître de problème particulier en matière de responsabilité pour violation du droit d’auteur[19]. Troisièmement, CarGurus n’avait indexé que les photographies figurant sur les sites Web des concessionnaires, et avait évité d’indexer le contenu du propre site Web de Trader, afin de respecter la propriété intellectuelle de cet opérateur. Cette dernière mesure prise par CarGurus revêtait une importance particulière, compte tenu de la propre décision de la société Trader de ne pas informer CarGurus, lors de ses communications initiales, du fait qu’elle était titulaire du droit d’auteur sur les photographies apparaissant sur les sites Web des concessionnaires. Dès que CarGurus avait été informée de cette situation, elle avait immédiatement supprimé de son site les photographies litigieuses.

À la lumière de ces mesures prises par les deux parties, la Court a estimé que CarGurus n’avait pas agi de mauvaise foi et a donc refusé d’accorder des dommages-intérêts punitifs[20].

Ainsi, l’affaire CarGurus donne de précieuses indications sur les types de mesures que doit prendre une organisation au titre de la diligence raisonnable en matière de propriété intellectuelle pour éviter que la Cour ne conclue à sa mauvaise foi et pour se mettre à l’abri des réclamations en dommages-intérêts punitifs (et, probablement, pour réduire le montant des dommages-intérêts préétablis accordés). De plus, cette décision suggère certaines mesures à prendre par les titulaires de droits de propriété intellectuelle en vue de maximiser la récupération en cas de litige.

Tout d’abord, cette décision vient confirmer l’importance d’obtenir un avis juridique en matière de propriété intellectuelle afin de faire valider tout nouveau modèle d’affaires en regard du droit canadien. La Cour a accordé beaucoup de poids au fait que CarGurus avait obtenu un avis juridique en matière de droit d’auteur canadien, tout en estimant par ailleurs que d’autres mesures de diligence raisonnable auraient probablement dû être prises[21].

Deuxièmement, la Cour a considéré que la légalité du modèle d’affaires de CarGurus aux termes de la législation américaine sur le droit d’auteur laissait croire à la bonne foi de cette société en regard du droit canadien. Une telle conclusion ne peut que rassurer les entreprises étrangères ayant des activités en lien avec le droit d’auteur qui prévoient s’implanter au Canada en utilisant un modèle d’affaires testé à l’étranger. Même si la législation sur le droit d’auteur peut à certains égards varier de façon importante d’un pays à l’autre, la décision CarGurus laisse croire qu’une entreprise faisant valoir un modèle d’affaires dont l’efficacité a été établie à l’étranger et un avis juridique canadien pourrait trouver grâce auprès des tribunaux de notre pays.

Troisièmement, cette décision sert de mise en garde aux titulaires de droits de propriété intellectuelle au sujet du danger de créer des ambiguïtés autour de la titularité et de la violation de tels droits. Avant l’introduction du litige, la société Trader était délibérément restée vague au sujet de son droit d’auteur sur les photographies en cause, et a été à plusieurs reprises critiqué par la Cour pour avoir adopté une telle attitude[22]. Cette affaire donne à penser que les meilleures pratiques en matière de protection des droits de propriété intellectuelle passent par une affirmation claire et rapide de ces droits, à défaut de quoi le défendeur pourrait invoquer une telle inaction pour faire valoir sa bonne foi.



[1]       Trader Corp v CarGurus Inc, 2017 ONSC 1841 [CarGurus].

[2]       Loi sur le droit d’auteur, par. 41.27(5).

[3]       CarGurus, au par. 46 [le soulignement est dans l’original].

[4]       Loi sur le droit d’auteur, par. 2.4(1.1) [soulignement ajouté].

[5]       CarGurus, au par. 31 et 34.

[6]       ESA c. SOCAN, 2012 CSC 34.

[7]       CarGurus, au par. 33.

[8]       Si la question du cadrage a déjà été abordée dans des décisions antérieures, les tribunaux ont cependant soit refusé d’aborder la question, soit considéré qu’elle ne relevait pas du droit d’auteur, mais plutôt de la rupture de contrat, comme par exemple dans l’affaire Century 21 Canada v Rogers Communications, 2011 BCSC 1196, aux par. 10(d), 383 et 391 (violation des conditions d’utilisation du site Web), ou de la contrefaçon d’une marque de commerce, par exemple dans Imax Corp v Showmax Inc, [2000] F.C.J. no 69, aux par. 25-26 (1re inst.) (l’origine du contenu cadré serait source de confusion pour les consommateurs).

[9]       Svensson v Retriever Sverige AB, décision du 13 février 2014, EU:C:2014:76, aux par. 27-30. La Cour de justice de l’Union européenne a précisé que cette décision ne s’appliquait pas si le lien ou le cadre permet de contourner des mécanismes de sécurité mis en place par le site cible (par. 31).

[10]     CarGurus, au par. 37

[11]     Bell c. SOCAN, 2012 CSC 36.

[12]     CarGurus, aux par. 38-40.

[13]     CarGurus, au par. 57, citant Telewizja Polsat c. Radiopol, 2006 CF 584 et Century 21 Canada v Rogers Communications, 2011 BCSC 1196.

[14]     CarGurus, au par. 58.

[15]     CarGurus, au par. 58.

[16]     Les facteurs pris en considération par la Cour sont résumés au par. 67.

[17]     CarGurus, au par. 68.

[18]     CarGurus, au par. 61.

[19]     CarGurus, au par. 61-62.

[20]     CarGurus, au par. 68, faisant références aux constatations des par.60-65.

[21]     CarGurus, aux par. 61-62 et 67 (dernier point).

[22]     CarGurus, aux par. 11, 14 et 63-64

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Auteurs

  • Jean-Philippe Mikus, Associé | Agent de marques de commerce | Propriété intellectuelle, Montréal, QC, +1 514 397 5176, jpmikus@fasken.com
  • Michael Shortt, Associé | Agent de marques de commerce | Jeux vidéo et jeux d'ordinateur, Propriété intellectuelle, Montréal, QC, +1 514 397 5270, mshortt@fasken.com

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