L’Association canadienne du capital de risque et d’investissement (CVCA) a publié ses aperçus du marché canadien pour la fin de 2024, lesquels sont fondés sur les données fournies volontairement par un éventail de sociétés de capital de risque et de capital d’investissement. Pour obtenir de plus amples renseignements, consultez les aperçus 2024 Canadian Venture Capital Market Overview et 2024 Canadian Private Equity Market Overview (en anglais seulement). Les points importants à retenir selon nous sont les suivants :
Aperçu du marché canadien du capital de risque
- En 2024, la taille des opérations de capital de risque a connu une hausse par rapport aux exercices précédents. Au total, 7,9 G$ ont été investis dans le cadre de 592 transactions, dont 1,4 G$ dans 124 transactions au cours du quatrième trimestre seulement.
- L’Ontario, la Colombie-Britannique et le Québec maintiennent leur position de tête parmi les provinces en ce qui a trait aux investissements de capital de risque. Ensemble, elles représentent 88 % de la totalité du capital investi et 76 % de l’ensemble des opérations en 2024. La Colombie-Britannique a bousculé les tendances historiques en matière d’investissement au pays en suivant l’Ontario de près. L’écart entre les deux provinces est le plus faible jamais enregistré à ce jour. Plus de 2,4 G$, répartis sur 88 transactions, ont été investis dans la province, et la taille moyenne des transactions a grimpé en flèche pour atteindre un sommet record de 27,9 M$. Cette hausse est en partie attribuable au tour de financement de capital de risque de 1,24 G$ de Clio, une société de technologies juridiques située en Colombie-Britannique. Il s’agit du plus important tour de financement jamais enregistré dans l’histoire du Canada. Les tendances des Prairies sont restées les mêmes, mis à part pour le Manitoba, qui a vu ses investissements chuter de 96 %. La majeure partie du Canada atlantique, quant à elle, a vu ses investissements totaux diminuer de près de 50 % par rapport à 2023.
- En ce qui concerne l’activité sectorielle en 2024, le secteur des technologies de l’information et des communications (TIC) est resté en tête des activités de capital de risque, avec 4,5 G$ investis dans le cadre de 285 transactions. Ces chiffres représentent une augmentation de 12,6 % en capital investi par rapport à l’exercice précédent, et ce, malgré une baisse du nombre d’opérations. Le secteur des sciences de la vie a poursuit sa croissance sur plusieurs années avec une augmentation de 15,4 % en capital investi depuis 2023. Cette hausse résulte surtout des investissements dans les sociétés de médicaments thérapeutiques et biologiques. Pour sa part, le secteur des technologies propres a attiré 1,1 G$ répartis sur 58 transactions. La taille moyenne des transactions, soit 18,4 M$, est la plus élevée à ce jour, le sous-secteur du matériel d’énergie de remplacement étant à l’origine de près des deux tiers de l’ensemble des activités d’investissement. Toutefois, le secteur agroalimentaire a vu ses investissements baisser de 41,6 % pour un total de 157 M$ répartis sur 41 transactions.
- Les « mégatransactions », que l’étude définit comme des transactions d’une valeur de plus de 50 M$, ont continué de jouer un rôle important dans les activités de capital de risque, 24 d’entre elles représentant 62 % de tous les fonds de capital de risque investis en 2024. Bien qu’on ait compté 10 mégatransactions de moins depuis 2023, leur taille moyenne a doublé au cours de l’année pour atteindre 203,83 M$.
- Le nombre de sorties s’est avéré inférieur à celui de 2023, les sommes obtenues ayant totalisé 5,2 G$ répartis sur 40 sorties, dont la plupart résultent de transactions de fusions et acquisitions (F&A). On constate, pour la troisième année de suite, l’absence de PAPE financés par du capital de risque, ce qui souligne la persistance des incertitudes sur les marchés publics et une tendance selon laquelle les sociétés demeurent fermées plus longtemps.
- En 2024, la baisse des activités d’investissement en phase de démarrage (principalement des tours de financement de séries A et B) s’est poursuivie. Ces activités continuent malgré tout d’apporter la plus grande contribution (37 %) à la totalité du capital investi en 2024. Si le nombre de transactions et la totalité du capital investi – qui ont chuté de 31,4 % et de 18 %, respectivement – se trouvent sous la moyenne quinquennale, la taille moyenne des transactions a tout de même augmenté. Ces résultats suggèrent que les investisseurs en capital de risque privilégient la qualité plutôt que la quantité. De même, les investissements d’amorçage, qui représentaient 34 % de l’ensemble des opérations totalisant 510 M$ répartis sur 201 transactions, ont diminué de 14 % (selon le nombre d’opérations) et de 47 % (selon la valeur des opérations) par rapport à 2023. Les sociétés déjà bien établies étaient à l’origine de 27 % de la valeur totale des investissements (2,1 G$ répartis sur 52 transactions), mais leurs activités ont diminué, même si elles ont maintenu des niveaux plus élevés qu’avant 2020.
- Les facilités d’emprunt de capital de risque ont atteint un nouveau record avec 881 M$ investis dans le cadre de 35 transactions, ce qui représente un essor fulgurant de 99 % des sommes investies, et ce, malgré une baisse du nombre d’opérations. De plus, le second semestre de l’année représentait 75 % de tout le financement par emprunt à risque, témoignant d’une évolution de la tendance vers des options de financement non dilutif.
- En dépit d’une baisse de 2 % par rapport à l’exercice précédent, les investisseurs américains, qui ont contribué à 32 % de l’ensemble des opérations de capital de risque, sont toujours en tête de la participation étrangère. D’autre part, l’intérêt de la part des marchés asiatiques a légèrement augmenté, tandis que la participation des investisseurs européens a connu une légère baisse pour s’établir à 6 %.
Aperçu du marché canadien du capital d’investissement
- L’année 2024 a été marquée par une reprise très attendue du marché canadien du capital d’investissement. Les investissements totaux ont atteint 27,5 G$ répartis sur 658 transactions, dépassant ainsi tous les niveaux annuels d’investissement des six dernières années. Les mégatransactions, que l’étude définit comme des transactions d’une valeur de plus de 500 M$, ont d’ailleurs joué un rôle déterminant. En effet, huit d’entre elles ont totalisé 67 % de l’ensemble des activités de capital d’investissement.
- Les transactions évaluées à moins de 25 M$ continuent de dominer les activités actuelles de capital d’investissement au Canada, mettant ainsi en évidence le rôle essentiel du capital d’investissement dans le soutien des PME. Comme en 2023, 84 % de toutes les transactions dont la valeur a été divulguée avaient une valeur inférieure à 25 M$. De plus, 31 transactions ont dépassé les 100 M$, tandis que 7 transactions ont dépassé 1 G$. On constate par ailleurs une augmentation de 169 % de la taille moyenne des transactions par rapport à l’exercice précédent (pour un total de 41,8 M$), soit 70 % de plus que la moyenne quinquennale. Ce changement témoigne d’un regain de confiance de la part des investisseurs et d’un appétit renouvelé pour les transactions capitalistiques de plus grande envergure.
- Dans l’ensemble, les activités de capital d’investissement se sont tournées vers les transactions d’acquisition secondaire et d’investissements complémentaires, dont les investissements minoritaires représentent un peu plus de 10 % de tout le capital investi. On compte parmi ces activités 164 transactions totalisant 2,8 G$, soit une baisse de 14 % du nombre de transactions et de 47 % de la valeur des investissements minoritaires.
- Le Québec demeure la province la plus active en matière de capital d’investissement en 2024. Elle représente à elle seule 59 % du flux total de transactions et 60 % de la totalité du capital investi (soit 19,1 G$ investis dans le cadre de 385 transactions), bien qu’une part importante de sa position dominante dans ce secteur soit attribuable à la privatisation de Nuvei[1], d’une valeur de 8,9 G$. Bien que l’Ontario ait attiré 5,4 G$ répartis sur 145 transactions, ce qui ne représente que 19 % de la totalité du capital investi (comparativement à 40 % en 2023), les investissements sont restés plus élevés par rapport aux moyennes quinquennales à raison de 47,8 %, ce qui laisse entrevoir une croissance durable malgré une diminution de la part du marché de la province dans l’ensemble du pays. Le Nouveau-Brunswick s’est classé en troisième position quant au capital investi avec 1,6 G$ répartis sur quatre transactions, mais dont la majeure partie provient d’une seule mégatransaction. La Colombie-Britannique s’est classée en troisième position quant au volume de transactions avec 67 transactions totalisant 470 M$.
- Malgré une hausse générale des investissements dans le secteur du capital d’investissement en 2024, l’intérêt marqué pour les sociétés technologiques canadiennes n’a pas faibli. Le secteur des TIC reste en tête avec près de 15,3 G$ répartis sur 117 transactions, ce qui représente 55,5 % de l’ensemble des investissements. Le secteur de la consommation et de la vente au détail se classe en deuxième position avec 4,1 G$ répartis sur 59 transactions, notamment grâce à des transactions de grande valeur dans certaines sociétés clés du secteur. Les activités d’investissement dans ce secteur ont été particulièrement nombreuses lors du second semestre; 97 % du capital a été investi au T3 et au T4. D’autres secteurs sont également dignes de mention, dont le secteur industriel et de la fabrication (1,1 G$ investis, répartis sur 157 transactions, soit une réduction de 31 % du capital investi par rapport à 2023) et le secteur des sciences de la vie (978 M$ investis, répartis sur 62 transactions, soit une augmentation de 73 % par rapport à la moyenne quinquennale), ce qui a pour effet de diversifier davantage le monde de l’investissement au Canada.
- En 2024, il y a eu lieu 86 sorties financées par du capital d’investissement pour un total de 6,7 G$, soit près de 10 fois la valeur des sorties de l’exercice précédent. Les transactions de fusions et acquisitions, qui représentent 74 % des sorties, demeurent la stratégie de sortie incontestée. En revanche, les acquisitions secondaires ont été à l’origine de 70,6 % de la valeur réelle des sorties, ce qui s’explique par l’augmentation de la valeur de sortie moyenne des acquisitions secondaires, qui a atteint 213,9 M$, par rapport à la valeur de sortie moyenne globale de 77,5 M$ pour l’année. La position dominante des acquisitions secondaires s’inscrit dans la forte propension du marché à privilégier les sociétés financées par du capital d’investissement, les sociétés canadiennes choisissant de rester fermées plus longtemps. Ces résultats cadrent avec le faible nombre de sorties par voie de PAPE en 2024. Il s’agit, en l’occurrence, de la troisième année consécutive affichant peu d’activités d’introduction en bourse.
- Le quatrième trimestre de 2024 a été le plus actif, représentant 56 % de la totalité du capital investi (15,4 G$) et 26 % de l’ensemble des 174 transactions, ce qui témoigne d’une accélération considérable du flux de transactions. Il s’agit du montant le plus élevé jamais enregistré au cours d’un seul trimestre de l’histoire du capital d’investissement au Canada, un montant en grande partie attribuable aux privatizations de Nuvei et de Sleep Country.
Conclusion
Alors que le paysage économique du Canada subit de profonds changements et suivant l’élection fédérale dans la première moitié de 2025, les deux études publiées par la CVCA tombent à point nommé. Elles fournissent non seulement des données essentielles sur les tendances observées dans les domaines du capital de risque et du capital d’investissement, mais aussi de précieuses indications sur l’éventuelle trajectoire des marchés.
Grâce aux sommes importantes investies dans des secteurs clés comme les TIC, les sciences de la vie et les technologies propres en 2024, le marché canadien du capital d’investissement a su faire preuve de résilience et d’adaptabilité. En dépit de la baisse des investissements en phase de démarrage et des conditions de sortie difficiles, les sociétés ont tendance à rester fermées plus longtemps, et les activités de capital de risque tendent à favoriser les transactions de plus grande envergure. Cela dit, l’étude souligne que la réduction des investissements en phase d’amorçage et en phase de démarrage pourrait soulever des préoccupations quant à l’avenir des sociétés en démarrage à forte croissance au Canada.
Le marché canadien du capital d’investissement a connu une reprise remarquable en 2024, notamment en raison de transactions à grande échelle et d’investissements considérables dans les secteurs des TIC, de la consommation et de la vente au détail, ainsi que de l’automobile et du transport. Malgré une hausse de la valeur des sorties financées par du capital d’investissement, l’absence de PAPE financés par du capital d’investissement concorde avec la tendance des sociétés canadiennes à rester fermées plus longtemps. Il va sans dire que 2024 aura été une année faste en matière de capital d’investissement. Il sera donc intéressant d’observer l’évolution des marchés et des tendances du capital d’investissement au cours des prochains mois.
Restez à l’affût pour d’autres observations et principaux points à retenir alors au cours de l’année 2025!